
Droit Immobilier : Nouvelles Règles de Construction – Ce que vous devez savoir en 2024
Le secteur de la construction connaît actuellement une transformation profonde sous l’impulsion des nouvelles réglementations environnementales et des évolutions sociétales. Pour les professionnels comme pour les particuliers, ces changements impliquent une adaptation rapide aux nouvelles exigences légales. Décryptage des principales modifications qui redessinent le paysage du droit immobilier français.
La réglementation environnementale 2020 (RE2020) : un tournant majeur
La RE2020, entrée en vigueur progressivement depuis janvier 2022, constitue une avancée considérable dans la manière dont nous concevons les bâtiments. Remplaçant la RT2012, cette nouvelle réglementation ne se contente plus de limiter la consommation énergétique, mais intègre également l’impact carbone des constructions tout au long de leur cycle de vie.
Les maîtres d’ouvrage doivent désormais s’assurer que leurs projets respectent trois exigences principales : la sobriété énergétique, la diminution de l’impact carbone et l’adaptation au changement climatique. Concrètement, cela se traduit par l’obligation de réaliser une analyse du cycle de vie (ACV) pour chaque nouveau bâtiment, prenant en compte l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre depuis l’extraction des matières premières jusqu’à la fin de vie de l’édifice.
Les seuils d’émission carbone deviennent progressivement plus stricts selon un calendrier préétabli, avec des paliers en 2025, 2028 et 2031. Cette planification permet aux acteurs du secteur d’anticiper les évolutions et d’adapter leurs pratiques. Pour les constructeurs, cela implique de repenser leurs méthodes de travail et leurs choix de matériaux, privilégiant désormais les solutions à faible impact environnemental comme le bois ou les matériaux biosourcés.
Les évolutions du dispositif MaPrimeRénov’ et des aides à la rénovation
La rénovation énergétique des bâtiments existants constitue un enjeu majeur pour atteindre les objectifs climatiques de la France. En 2024, le dispositif MaPrimeRénov’ a connu d’importantes modifications visant à encourager les rénovations d’ampleur plutôt que les travaux isolés.
Désormais, les aides sont principalement orientées vers les rénovations globales, permettant un gain énergétique d’au moins deux classes sur le diagnostic de performance énergétique (DPE). Cette approche, plus efficace pour réduire significativement la consommation énergétique du parc immobilier français, s’accompagne d’un renforcement des contrôles pour lutter contre les fraudes qui ont pu entacher le dispositif ces dernières années.
Le gouvernement a également revu les barèmes d’attribution, avec une attention particulière portée aux ménages modestes et très modestes qui bénéficient de taux de prise en charge plus élevés. Pour les copropriétés, MaPrimeRénov’ Copropriétés continue de proposer un accompagnement spécifique, reconnaissant les défis particuliers que représente la rénovation des immeubles collectifs.
Par ailleurs, comme l’expliquent les experts de droit immobilier international, ces dispositifs s’inscrivent dans une tendance européenne plus large, avec des mécanismes similaires mis en place dans plusieurs pays de l’Union pour accélérer la transition énergétique du secteur du bâtiment.
L’encadrement renforcé des passoires thermiques
Dans le prolongement de la loi Climat et Résilience de 2021, l’année 2024 marque une nouvelle étape dans la lutte contre les passoires thermiques. Depuis le 1er janvier, les logements classés G+ (consommation énergétique supérieure à 450 kWh/m²/an) ne peuvent plus être mis en location, y compris pour les baux en cours qui ne peuvent être renouvelés.
Cette interdiction s’étendra progressivement aux autres logements énergivores : l’ensemble des logements classés G en 2025, puis les logements classés F en 2028 et enfin les logements classés E en 2034. Pour les propriétaires bailleurs, ces échéances imposent d’anticiper les travaux nécessaires pour maintenir leurs biens sur le marché locatif.
Parallèlement, l’obligation d’audit énergétique préalable à la vente s’est étendue en 2024 aux logements classés E, après avoir concerné les classes F et G depuis 2023. Cet audit, plus complet qu’un simple DPE, doit proposer un parcours de travaux permettant d’améliorer significativement la performance énergétique du bien.
Les collectivités territoriales se voient également attribuer de nouveaux outils pour identifier et suivre les passoires thermiques sur leur territoire, avec la mise en place d’observatoires locaux et la possibilité de mettre en demeure les propriétaires de réaliser des travaux dans certaines situations.
Les nouvelles normes d’accessibilité et d’adaptabilité des logements
Face au vieillissement de la population française, le législateur a renforcé les exigences en matière d’accessibilité et d’adaptabilité des logements neufs. La notion de logement évolutif, introduite par la loi ELAN, continue de se préciser avec de nouveaux textes d’application.
Désormais, 20% des logements dans les immeubles collectifs neufs doivent être accessibles aux personnes à mobilité réduite dès la construction, tandis que les 80% restants doivent être évolutifs, c’est-à-dire pouvoir être rendus accessibles par des travaux simples. Cette approche vise à concilier les besoins immédiats des personnes en situation de handicap et l’anticipation du vieillissement de la population.
Les spécifications techniques concernant ces logements évolutifs ont été précisées : largeur minimale des circulations, caractéristiques des salles d’eau, hauteur des prises électriques, etc. Ces normes visent à faciliter l’adaptation future du logement sans nécessiter de travaux structurels coûteux.
Pour les promoteurs immobiliers et les architectes, ces évolutions impliquent de repenser la conception des espaces intérieurs pour intégrer cette dimension évolutive dès les premières esquisses du projet. Certains y voient une contrainte supplémentaire, d’autres une opportunité de proposer des logements plus durables et adaptés aux parcours de vie des occupants.
La digitalisation des procédures d’urbanisme et de construction
La dématérialisation des procédures administratives liées à la construction connaît une accélération notable. Depuis 2022, toutes les communes doivent être en mesure de recevoir et d’instruire par voie électronique les demandes d’autorisation d’urbanisme (permis de construire, déclarations préalables, etc.).
Cette dématérialisation s’accompagne d’une refonte des processus administratifs visant à simplifier et accélérer l’instruction des dossiers. Le développement de la plateforme PLAT’AU (Plateforme des Autorisations d’Urbanisme) permet désormais un échange fluide entre les différents acteurs impliqués dans l’instruction : services de l’État, collectivités, gestionnaires de réseaux, etc.
Pour les maîtres d’œuvre et les particuliers, ces évolutions se traduisent par un gain de temps appréciable et une meilleure traçabilité des dossiers. La possibilité de suivre en temps réel l’avancement de l’instruction et d’échanger directement avec les services concernés représente une avancée significative dans un domaine longtemps caractérisé par sa lourdeur administrative.
Parallèlement, l’utilisation du Building Information Modeling (BIM) continue de se généraliser, facilitant la coordination entre les différents intervenants d’un projet et permettant une meilleure anticipation des problématiques techniques. Certaines collectivités commencent même à accepter les maquettes numériques comme pièces constitutives des demandes d’autorisation, ouvrant la voie à une instruction plus précise et plus rapide.
Les enjeux de la construction en zones à risques
Les événements climatiques extrêmes de ces dernières années ont mis en lumière la vulnérabilité de certaines constructions face aux risques naturels. En réponse, la réglementation s’est considérablement renforcée, avec une révision des Plans de Prévention des Risques Naturels (PPRN) dans de nombreuses communes.
Les zones inondables, particulièrement concernées, font l’objet d’une attention accrue avec l’interdiction de nouvelles constructions dans les secteurs les plus exposés et des prescriptions techniques renforcées pour les zones à risque modéré. Ces mesures peuvent inclure l’élévation du premier niveau habitable, la création d’espaces refuges ou l’utilisation de matériaux résistants à l’immersion.
Le risque retrait-gonflement des argiles, responsable de nombreux sinistres ces dernières années, est également mieux pris en compte. Depuis 2020, une étude géotechnique préalable est obligatoire pour toute construction nouvelle en zone d’exposition moyenne ou forte, permettant d’adapter les fondations aux caractéristiques du sol.
Ces évolutions réglementaires s’accompagnent d’un renforcement des contrôles et de la responsabilité des constructeurs et des bureaux d’études. La jurisprudence récente tend à sanctionner sévèrement les manquements à l’obligation de conseil concernant les risques naturels, même lorsque ces derniers n’étaient pas formellement identifiés dans les documents d’urbanisme au moment de la construction.
Conclusion : vers une construction plus responsable et résiliente
Les nouvelles règles de construction dessinent les contours d’un secteur immobilier en profonde mutation. L’impératif environnemental, la nécessité d’adapter les logements aux évolutions démographiques et la prise en compte accrue des risques naturels convergent vers un même objectif : construire de manière plus durable, plus adaptable et plus résiliente.
Pour les professionnels du secteur comme pour les particuliers porteurs de projets, ces évolutions impliquent une mise à jour constante des connaissances et des pratiques. Si elles peuvent parfois apparaître comme des contraintes supplémentaires, ces nouvelles règles constituent avant tout une réponse nécessaire aux défis contemporains et futurs de l’habitat.
La transition vers ce nouveau modèle de construction nécessite un accompagnement adapté, tant sur le plan technique que financier. Les pouvoirs publics, conscients de ces enjeux, continuent de faire évoluer les dispositifs d’aide et d’accompagnement pour faciliter cette transformation essentielle du cadre bâti français.